Expiation, Ian McEwan




Ian McEwan est anglais et qui dit anglais dit corrosif, non ?

Né en 1948, Ian McEwan est un auteur réputé. Richard Ford dit de lui qu’il est le plus grand écrivain contemporain, rien que ça. Singapour, Libye, Allemagne, Ian McEwan a grandi dans plusieurs pays, suivant son père officier écossais dans l’armée britannique. Des études brillantes puis très tôt les premiers écrits, des nouvelles où déjà il parle de l’interdit, de la perversion, du mal, ces questions qui l’ obsèdent. Prix Fémina étranger en 1993 pour L’Enfant volé, l’auteur anglais y montre déjà son appétit pour les histoires tordues, mettant en scène des enfants qui perdent leur innocence  dans un mode sordide sujet de toutes les déviances. Plus tard, il obtiendra la consécration avec Amsterdam, qui fit polémique mais reçu le très prestigieux prix Booker 1998.

Expiation sort en 2001 et concentre ce qui fait le sel de l’œuvre provocatrice de McEwan : Été 1935, Briony, une petite fille de 13 ans, écrit une pièce de théâtre Les Tribulations d'Arabella en vue de l'arrivée de son frère Léon. Elle surprend sa sœur Cecilia se disputant près d'une fontaine avec le fils d'une employée de la maison, Robbie. Son manque de compréhension du monde adulte la pousse à commettre une faute qui fera basculer cette journée dans le drame : Robbie est incarcéré de force après avoir commis un terrible parjure, plus tard la guerre éclate et Robbie est envoyé au front en tant que soldat prisonnier. Briony deviendra infirmière, Cecilia, quant à elle, n'adressera plus jamais la parole à sa sœur. Briony, consciente qu'elle a détruit l'amour et la vie de deux jeunes âmes, tentera tout au long de son existence de retrouver contact avec sa sœur.

« Comment un écrivain peut-il se racheter, alors que, doué du pouvoir absolu de décider de la fin, il est également Dieu ? Il n'a personne, ni entité, ni forme supérieure à qui en appeler, avec qui se réconcilier ou qui puisse lui pardonner. Il n'existe rien en dehors de lui. En imagination, il a fixé les limites et les termes. »

L’histoire, bien que classique est très bien ficelée, pas un instant on ne s’ennuie en suivant le destin de Briony, de Cecilia et de Robbie. On sent que McEwan sait où il veut nous emmener et comment y aller, ce qui confère au récit une dimension de tragédie grecque. Très vite, la sombre destinée de nos trois personnages apparaît. Tout est tendu, ajusté au millimètre, McEwan se pose en orfèvre et sa macabre mécanique ne s’enraille pas, c’est aussi clinique que froid.

« Mon enfant bien-aimée, tu es jeune et charmante,
Mais naïve tu crois, car du monde ignorante,
Voir le monde à tes pieds,
Alors qu'il ne demande qu'à te piétiner. »

Le style de Ian McEwan est chirurgical. Il est d’une précision, d’un sens du détail aiguisé. Sans jamais sacrifier la clarté, son écriture reste néanmoins touffue, dense, ample. J’ai mis quelques dizaines de pages à m’approprier cette plume très reconnaissable. En parfait british, McEwan est un savant mélange entre acidité et humour, à peine dissimulé au détour d’une phrase à l’ironie grinçante.

« Au-delà d'un certain âge, traverser la ville donne désagréablement à penser. Les adresses des morts s'accumulent. »

Je pense qu’Expiation est un roman important, écrit par un grand auteur. Il partagera sans doute le lecteur qui peut ne pas entrer dans cette machine infernale mais on ne peut que saluer le travail d’horloger de McEwan qui livre un roman de 496 pages sans une once de gras.
Je lirai d’autres romans du Sir McEwan


PS : Expiation a été adapté au cinéma par Joe Wright sous le titre Reviens-moi avec Saoirse Ronan, Keira Knightley et James McAvoy. Je ne l’ai cependant pas vu dont je ne saurai vous en dire d’avantage, peut être lors d’un prochain billet !


Publié par Lux

3 commentaires:

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  2. Comment ai-je pu oublier avoir lu ce livre ? Grâce à ton article, les détails me reviennent et j'ai envie de revivre (entre autres) cette soirée d'été où tout bascule.
    N'y a-t-il pas que les grands livres que l'on relit ?

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  3. Merci ! C'est incontestablement un livre marquant par bien des égards... Je ne sais pas si on ne relit que les grands livres, mais celui-là, oui !

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